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Le différé d’indemnisation fait tomber la totalité de la convention d’assurance chômage

Le Conseil d’État a annulé, avec effet au 1er mars 2016, l’arrêté du 25 juin 2014 qui agréait la convention d’assurance chômage et son règlement annexé (arrêté du 25 juin 2014, JO du 26).

Cette annulation a pour origine le différé spécifique d’indemnisation, dont la convention d’assurance chômage avait durci sensiblement le régime. Rappelons ce mécanisme vise à retarder le versement des allocations de chômage compte tenu des indemnités ou sommes supralégales éventuellement perçues par l’ex-salarié. Les partenaires sociaux avaient ainsi modifié les modalités de calcul du différé et, pour les ruptures fondées sur un motif autre qu’économique, relevé sa durée maximale de 75 à 180 jours (règlt ass. chôm. du 14 mai 2014, art. 21, § 2). L’un des objectifs de cette réforme était de freiner l’expansion des ruptures conventionnelles.

Toutefois, le mécanisme du différé d’indemnisation peut s’avérer particulièrement lourd de conséquences pour les salariés qui totalisent moins de 2 ans d’ancienneté ou qui travaillent dans une entreprise de moins de 11 salariés. En effet, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, ces salariés ne bénéficient pas, pour la fixation du montant des dommages et intérêts, du plancher légal de droit commun d’au moins 6 mois de salaire : le juge détermine librement l’indemnité due au salarié, en fonction du préjudice subi (c. trav. art. L. 1235-5). Cette indemnité est donc intégralement considérée comme supralégale, de sorte qu’elle est prise en compte en totalité dans le calcul du différé d’indemnisation (circ. Unédic 2014-26 du 30 septembre 2014, fiche 4, § 1.1.2.1.2).

C’est cette situation qui a poussé plusieurs associations, ainsi que des salariés, à contester avec succès l’arrêté d’agrément de la convention d’assurance chômage du 14 mai 2014. Sans remettre en cause le principe même du différé d’indemnisation, le Conseil d’État a estimé que ce dispositif portait effectivement atteinte au droit à réparation des salariés de moins de 2 ans d’ancienneté ou travaillant dans une entreprise de moins de 11 salariés, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En outre, les juges administratifs ont considéré qu’il était impossible de ne supprimer que les dispositions incriminées, sans remettre en cause l’équilibre financier du régime. C’est donc la totalité de la convention qui est annulée.

Toutefois, conscient des répercussions d’une telle décision, le Conseil d’État a préféré en différer les effets : la convention d’assurance chômage (et donc le mécanisme de différé d’indemnisation) cessera de s’appliquer le 1er mars 2016 (sous réserve des actions contentieuses engagées au 5 octobre 2015). Les partenaires sociaux ont donc un peu moins de 5 mois pour négocier une nouvelle convention.

CE 5 octobre 2015, n° 383956

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